vendredi 29 octobre 2010

Mood of my day



Je fonds à cette volupté, fluide à mes oreilles et à cette élégance, étreinte à mes yeux.. me laisse envoûter par ce charme étrange et graphique, à la raideur guindée des vieux ballets nautiques, où la chorégraphie compte chacun de ses gestes.
Le mélange singulier, rappelle ces échos futuristes aux tensions électroniques, habillés de couleurs diaprées, rythmant encore notre mémoire proche, dans ces tableaux dansés comme échappés de fêtes désuètes.

Le décalage enjoleur nous enlace et nous entraîne ailleurs. Nous sommes alors, spectateurs discrets, glissant légers, le long des villes graphiques de Schuitten et Peters. Et nous lorgnons par des verrières dérobées, des théâtres impromtus sous le signe de ballets-glamours, où le nautisme n’est plus qu'un prétexte. 

Nous sommes peut-être encore, muets témoins d’un musical interlude, dans une métropolis surnaturelle changée pour l’occasion en cabaret-piscine, réplique mélancolique sous globe d’une vie révolue, dévidant comme une boîte à musique, une ronde sans fin. Un rêve né dans les fantasmagories de Moholy-Nagy.

On imagine sans peine ces baigneuses surannées, semblant de porcelaine, resurgies des fifties pour la cérémonie, troquer leurs maillots démodés, pour une armure ajourée, façon Daft-Punk... Avec en plus une touche sexy et ce brin de coquinerie qu’on lit à leurs yeux rieurs. Voyez ces sourires pétillants qui défilent, séducteurs, accrochés à ces notes célestes et profondes, sur un rythme qui vous laboure le coeur doucement...

De la beauté de cette grâce ancienne, j’aime l’éloquence nouvelle. Les voir en tendres épousailles, empreintes d’humour et de poésie, ballets tranquilles, élégants et précis, lents et hypnotiques.. sur une musique qui s’écoule, aux exaltations de mon coeur, se répand et ruisselle.... Un bijou ciselé fascinant qui plonge dans état serein. Que cette chaleur liquide me fait l'oreille gourmande et l'oeil encore plus ébahi. Elle vous tend les bras, ..  qu'elle vous soit un délice.

Lire la suite...

jeudi 21 octobre 2010

Pour Mémoire, traces: Abel Ferrara

















©Brad Stevens Abel Ferrara: la vision morale
FAB Press, Godalming, Surrey, Royaume-Uni, 2004



"La violence, c'est quand même terriblement graphique. Il y a dedans une énergie cinégénique incroyable. On entre dans le domaine de la métaphore, du symbole" Abel Ferrara 


Ce qui m'attire chez Ferrara c'est autant l'esthétique, d'une grande sobriété, que la narration, faite de la chair même des personnages, comme de celle des acteurs, mises au service d'un contenu qui a toujours du corps, et dont le propos et la puissance nous transpercent.

Il s'agit de cette capacité qu'il a de nous faire sentir l'humanité de ses personnages, et par la même de nous rendre la nôtre, parce qu'en suivant des pans de leurs existences, nous percevons à quels point nous sommes semblables dans nos quêtes et  nous prenons soudain conscience de nous-même, autrement.  Les préoccupations toutes en errances de ces individualités, peuvent nous toucher, car elles sont aussi les nôtres, peut-être bien au-delà de ce que nous voyons ou croyons voir.

Oui, il y a ce que nous ressentons et que nous enfouissons profondément, parce nous ne désirons pas nous en souvenir. Ferrara nous amène brutalement à y replonger et à nous rendre compte qu'au delà de notre petitesse d'êtres si seuls, il y a une certaine noblesse à être dans ce monde, en relation avec d'autres êtres tout aussi seuls que nous. Est-ce donc là la nature de ce qui nous relie?

Et c'est par cette plongée au coeur du réel et plus loin encore au coeur de l'intime, que le réalisateur dépeint la vision de ces ailleurs qui nous enveloppent et nous rassemblent, ainsi que la nature de toutes ces choses qui s'érigent entre nous, telles que le manque, la dépendance, l'addiction, la violence... mais n'est-ce pas nous qui les créons?  Et nous les montrant, il nous offre de nous en saisir, ou pas. Nous avons le choix.

ARTICLE: "Abel Ferrara et les figures du mal" Dominique Vergnes

Lire la suite...

Pour mémoire, traces: Cy Twombly

Cy Tombly dans son Atelier ©Editions Assouline

"Peindre implique un état de crise, ou du moins le moment crucial de la sensation" Cy Twombly. 1957.

Le peintre parle là, de sentir et non pas de voir , ou alors il s'agit bien d'un au-delà de la vision, dont il s'affranchit, donc de ce qui la précède ou ce qui lui succède, et de comment on traduit cet "état de crise" où survient "la sentation", l'offrant enfin, à la vision.


"(...) le "gauche" (ou le gaucher) est une sorte d'aveugle: il ne voit pas bien la direction, la portée de ses gestes ; sa main seule le guide, le désir de sa main, non son aptitude instrumentale; l'oeil c'est la raison, l'évidence, l'empirisme, la vraisemblance, tout ce qui sert à contrôler, à coordonner, à imiter, et comme art exclusif de la vision, toute notre peinture passée s'est trouvée assujettie à une rationalité répressive. D'une certaine façon, Twombly libère la peinture de la vision, car le "gauche", (le "gaucher") défait le lien de la main et de l'oeil, il dessine sans lumière.. (...) " Roland Barthes extrait de "Cy Twombly ou Non multa sed multum" in "L'obvie et l'obtus, Essais critiques III" cité par Leeman

SITE WEB: http://www.cytwombly.info/ Une large et belle iconographie.

Lire la suite...

mercredi 20 octobre 2010

L'oeuvre d'art ne vaut-elle qu'en elle-même?: Du jugement au discernement. 1


























Marcel EICHNER "8 x Elmer" 2010
gouache, acrylique et encre sur toile
170 x 140 cm



Au-delà de ce que montre une oeuvre d'art, ou de ce qu'elle ne montre pas, il y a en elle, et à travers elle, ce qui définit l'artiste dans son rapport au monde. Ainsi si nous envisageons l'oeuvre comme élément d'une démarche, partie d'un tout, nous pouvons l'appréhender dès lors qu'elle est fixée, comme un temps de la quête prenant visage, comme une expression autant incomplète et liminaire qu'incisive et universelle.


La trace visuelle profonde et intime d'une tentative de dialogue de l'artiste avec lui-même, questionnant cette nécessité créative, mais aussi sa compréhension du monde jusqu'à la place qu'il y tient. Au-delà de l'oeuvre que nous tentons de lire, il y a cette voix qui surgit, sens ouverts, qui nous entretient de ses mystères et lorsque l'on croit avoir épuisé les signes, flottent encore les bribes ciselées d'une singulière formule dont l'absolu reste à jamais inconnu.. Mais croit-on avoir compris qu'aussitôt, comme si souvent, le sentiment s'efface... Reste le goût de la question...

On ne peut prétendre saisir une oeuvre dans le sens que l'artiste porte en elle, comme dans son expression intrinsèque, ou la vision qu'elle provoque, sans la resituer dans une vie de création, ses contextes multiples à infinis, la démarche d'une vie entière.

Vouloir envisager l'oeuvre dans sa globalité serait peut-être, pourtant, déjà une erreur. Car nous omettrions, présomptueux, toute cette part encore en suspension, circulant dans l'éther, libre de combinaisons, structure ouverte reliée au cosmos, substance en gestation attendant de s'incarner, naître à notre vue enfin...

Nous nous priverions de découvrir peut-être la vision de l'artiste dans sa vraie nature, tendue dans la volonté de saisir et d'exprimer au plus près ce que lui dictent sa pensée, sa mémoire, ce cheminement vers le sens qui s'est à un moment imposé, flamboyant... une vision à instant seulement. Comme une clairvoyance en mouvement virevoltant au gré d'un sens qui s'ébruite, s'effrite, parvient encore pourtant dans la tempête que le processus à généré, à saisir quelques parcelles, à retrouver le fil de la piste brouillée, une couleur, une épaisseur, une tonalité, une scansion noire et charbonneuse, une texture, l'ébauche d'un volume...

.. la réminiscence que les yeux ont touché, cette évidence avant qu'elle ne s'enfuie.

Je songe à Christian Boltanski, tant décrié avec sa dernière oeuvre: "Personnes" montée pour "Monumenta" 2010. Une surmédiatisation momentanée qui a tout compte fait réduit cet artiste à cette seule oeuvre, comme s'il n'en avait produit aucune autre, oblitérant tout le processus créateur qui l'y a conduit. Cet homme de 66 ans, évolue pourtant dans une démarche artistique depuis l'âge de 13 ans.

Je pense encore à Salvador Dali qui avant de devenir le surréaliste que nous connaissons, a fait moultes incursions dans les divers courants ayant surgi au moment de sa formation. Pourquoi ne pas évoquer alors la période cubiste de Duchamp? Souvenez-vous également de Picasso, qui amoureux à nouveau, pouvait se remettre à peindre de façon figurative après avoir intensément digressé en tous médiums, dans cet entre-deux avant l'abstraction.

Je me souviens également des installations de Sarkis, dont certaines m'avaient fait sourire, - il y avait de l'humour mais je n'y voyais que de l'esbroufe -, acquérant avec le temps toujours plus d'élégance. Je veux encore citer Vincent Bioulès qui initiera le groupe Supports-Surfaces avant d'en revenir à dépeindre une certaine mémoire du temps par l'exploration du paysage.

Oui il est bon lorsque l'on ouvre une porte sur une forme d'inconnu d'aller à sa découverte au lieu de se contenter de rester sur le seuil, d'en examiner les signes extérieurs, revenant à en faire un ersatz vide de sens.


Lire la suite...